Chroniques de la Fin d’un Monde – Acte II

« Le cochon offre de nombreux points de comparaison avec un autre mammifère sans poils passé expert dans l’art de semer la merde et de se vautrer dedans. » (Desproges)

Cette année, j’ai décidé d’être un peu plus optimiste que d’habitude… Si, si, j’ai enfin réussi à canaliser mes tendances suicidaires.  Il faut dire que le flot de mauvaises nouvelles semble se tarir. Il n’y en plus que des bonnes.

Il y a, au moins, treize raisons de baigner dans l’optimisme :

  • Nicolas Sarkozy, notre serial-sauver national, nous a sauvés de la faillite. Et comme dirait Stéphane Guillon « Sans lui la France serait la Grèce, on mangerait de la feta, on écouterait du Demis Roussos et Nikos Aliagas serait Premier Ministre ».
  • Les ventes de caleçons flottants se porteraient très mal. Cette information tombe à pic. Je viens d’en jeter le dernier. Ses trous sont devenus trop nombreux pour qu’il puisse continuer à assurer sa mission naturelle. Sa tendance fâcheuse à se mettre en boule sous le pantalon le rendait irritant, et les bourrelets qui en découlaient disgracieux. Il est devenu tellement avachi que je ne pouvais plus me balader avec à la maison sans me faire flinguer par le regard dédaigneux de ma fille, me traitant implicitement, du haut de ses 7 ans, de « has been ». Grâce à une étude du magazine M (Le Monde), j’ai appris qu’en portant un caleçon moulant, je suis devenu « trendy » sans vraiment le vouloir. Il faut dire qu’il est spécialement mis en valeur par mon ventre musclé et mes pectoraux harmonieux (Et que ceux qui savent, se taisent à jamais…). Après le slip, le string (imaginez-moi en string) et le caleçon, et afin de rester dans le « move », je me prépare psychologiquement à me mettre au « megging », comme ce bon vieux Louis XIV. Ma photo sera bientôt surhttp://fuckyeahmeggings.tumblr.com/… Qui m’aime me suive !
  • Les riches exigent de payer plus d’impôts (pas tous… Certains se font la malle). J’ai adoré Stephen King (le maître de l’horreur) dans sa tribune poétiquement intitulée « Taxez-moi, merde ! » :  “I’ve known rich people, and why not, since I’m one of them? The majority would rather douse their dicks with lighter fluid, strike a match, and dance around singing ‘Disco Inferno’ than pay one more cent in taxes to Uncle Sugar.” Traduction approximative : « J’ai connu des gens riches, et pour cause, je suis l’un deux… La plupart préféreraient tremper leurs bites (excusez la traduction brute de coffrage) dans de l’essence, craquer une allumette et danser autour en chantant ‘Disco inferno’ plutôt que de payer un centime de plus à l’Oncle ‘Sucre’. »
  • Georges Friedmann, Hannah Arendt, et plus récemment Jeremy Rifkin (et même Michel Rocard), ont abordé le thème de la fin du travail dans le contexte d’une productivité en croissance constante et d’une croissance (quand elle n’est pas en berne) sans emploi. Youpi, on y est ! Nous sommes partis pour des années de croissance molle. Le travail de masse s’achève. Le plein-emploi est une relique du passé. J’entends le poète grec Antipatros entonne son hymne à l’oisiveté « Épargnez le bras qui fait tourner la meule, ô meunières, et dormez paisiblement! Que le coq vous avertisse en vain qu’il fait jour! ». Et que les inconditionnels défenseurs de la transcendante centralité du travail tremblent de rage!
  • D’après une étude de la revue Nature (« Approaching a state-shift in Earth’s biosphere »), mettant en avant l’accélération des changements climatiques et des pertes en termes de biodiversité, l’environnement terrestre pourrait franchir un point de non-retour avant la fin du siècle. Les écosystèmes de la planète pourraient connaître un effondrement total et irréversible d’ici 2100. Selon l’étude, 12 % à 39 % de la surface du globe connaitrait, sous la pression humaine, des conditions qui n’ont jamais été connues auparavant par les organismes vivants. La fulgurance de ce changement (à l’échelle du temps planétaire) empêcherait les écosystèmes de s’y adapter. Un des auteurs de l’étude résume la situation ainsi : « La planète ne possède pas la mémoire de son état précédent. Nous prenons un énorme risque à modifier le bilan radiatif de la Terre : faire basculer brutalement le système climatique vers un nouvel état d’équilibre auquel les écosystèmes et nos sociétés seront incapables de s’adapter. ». La bonne nouvelle est qu’en 2100, je ne serai plus là… L’autre bonne nouvelle (je vous ai dit qu’il y en a plein) est qu’avec un peu de chance, nous serons sauvés par l’empathie qui nous habite. J. Rifkin (le même qui nous parlait de la fin du travail) suggère dans son dernier livre que notre empathie naturelle pourrait rétablir l’équilibre menacé par l’entropie générée par notre espèce. « Si la nature humaine est matérialiste jusqu’à la moelle – égoïste, utilitariste, hédoniste -, on ne peut guère espérer résoudre la contradiction empathie-entropie. Mais si au plus profond, elle nous prédispose à (…) l’élan empathique, il reste au moins possible d’échapper au dilemme, de trouver un ajustement qui nous permette de rétablir un équilibre durable avec la biosphère  ». Me voilà rassuré…
  • Le ciel ne nous est pas tombé sur la tête. La crise n’est plus qu’un mauvais souvenir. La preuve : Gangnam Style, le clip déjanté du rappeur sud-coréen Psy (dans lequel il mime une danse du cheval) a franchi la barre symbolique du milliard de connexions Youtube. « Y’a des aristocrates et des parvenus, dans la connerie comme dans le reste. » (Audiard, Comment réussir quand on est con et pleurnichard – 1974). Dans tous les cas, la connerie humaine semble au top de son audience…
  • Une nouvelle étude menée, entre 1989 et 2005 en France, et portant sur plus de 26 000 hommes, montre un déclin spectaculaire (32%) de la concentration en spermatozoïdes du sperme, ainsi que de sa qualité (réduction 33%, de la proportion des spermatozoïdes de forme normale). Autrement dit, nos spermatozoïdes ne collent plus au canon de beauté du moment (imaginez les avec des boutons d’acné et des piercings sur la langue, les tétons et la queue) et se font plus rares là où on les attend normalement. C’est sûrement une crise d’adolescence doublée de tendances gothiques prononcées…  La bonne nouvelle c’est que j’ai déjà réussi, contre vents et marées, à procréer.  La seconde bonne nouvelle est qu’enfin, nous ferons l’amour sans aucune arrière-pensée primitive (de celles héritées de dizaines de milliers d’années d’évolution). Le tout, en épargnant à la Sécurité Sociale le coût superflu des moyens de contraception de tous genres (ce qui tombe plutôt pas mal compte tenu des soucis qu’on connait avec les pilules de 3ème et 4ème générations).
  • En attendant de pouvoir s’envoyer en l’air sans arrières-pensées procréatrices, sachez que les voyages en apesanteur se démocratisent : Dernièrement, l’agence spatiale française a fixé mars 2013 pour le démarrage de ses vols commerciaux de 2 h 30, comprenant cinq minutes d’apesanteur cumulées, pour 6 000 euros par personne. Pour ceux qui voudraient monter un peu plus haut et quitter l’atmosphère terrestre, Virgin Galactic fera leur bonheur : Un vol allant à 110 km au-dessus du sol, 6 minutes d’apesanteur, pour à peine 200 000 euros. Bonne nouvelle : la connerie humaine ne se refuse rien… Et « le jour où la connerie se vendra en tubes, il y en a qui seront les premiers à s’offrir une brosse à dents. » (Audiard)
  • Il n’y a pas que l’apesanteur qui se démocratise. La pauvreté aussi. Tout va bien quand on est tous dans la mouise… « Il paraît (même) que la crise rend les riches plus riches et les pauvres plus pauvres. Je ne vois pas en quoi c’est une crise. Depuis que je suis petit, c’est comme ça » (Coluche). La pauvreté concerne désormais des groupes sociaux préservés jusqu’ici par des mécanismes de solidarité familiale qui vacillent. Des millions de foyers sont rattrapés par le chômage de masse (on ne peut le dire autrement quand le quart de la population active est sans taf), le surendettement,  l’austérité implacable et les coupes drastiques dans les dépenses publiques d’éducation et de santé.  Les pays les riches couvent les ingrédients d’une crise sociale majeure, couplée à un traumatisme collectif. Et« quand les riches maigrissent, les pauvres meurent » (Proverbe chinois).
  • La polygamie sera bientôt proclamée « action d’utilité publique ». On discernera la légion d’honneur aux activistes polygames (car il faut être un révolutionnaire de la première heure pour tremper dans la polygamie). En Grèce, le taux de suicide a doublé au cours des trois dernières années, les trois-quarts des suicides étant commis par des hommes. Rien d’étonnant puisque que les hommes continuent à fonder leur identité, leur valeur, leur virilité, sur le travail. Bientôt, il y aura trop peu de mecs sur terre. C’est une bonne nouvelle en soi (il y aura moins de pipi sur les lunettes des chiottes).
  • Le transfert de technologie s’inverse et devient Sud-Nord. Par ce temps de crise, la Tunisie a réussi à exporter son savoir-faire en techniques suicidaires.  Giuseppe Campaniello, un maçon au chômage de Bologne, poursuivi pour ne pas avoir payé ses impôts, a opté pour l’immolation par le feu.
  • Sur l’île des Lotophages, le tourisme sexuel se porte à merveille. Les cougars sont en terrain conquis. La prostitution masculine est un métier d’avenir à condition de ne pas faire la fine bouche. Ce matin même, j’ai pu contempler ce business en plein essor : Une magnifique blonde d’un certain âge (mais d’un âge certain), aussi fripée qu’un Shar Pei, stand ambulant de la chirurgie esthétique ratée, au bras d’un jeunot (j’aurais pu dire un éphèbe, mais vous auriez pu le croire beau),  ayant le tiers de son âge, aux cheveux gominés et à la dentition jaune fluo. A Djerba, les films d’horreur se déroulent en pleine rue… Je me dis qu’il faut se prostituer un coup pour voir ce que le dévouement professionnel peut nous faire gober.
  • Etre un homme battu n’est plus un tabou. Les hommes violentés psychologiquement, physiquement et même parfois sexuellement par leurs femmes peuvent enfin s’adresser à SOS Hommes battus, association créée en 2009 par (paradoxalement ?) une femme : Sylvianne Spitzer, psychologue et experte en criminologie.  J’ai démarré mes recherches sur le sujet il y a quelques mois, suite à des discussions enflammées avec ma femme sur (devinez quoi !) les hommes violés. J’ai été ahuri par les chiffres disponibles aux Etats-Unis, au Canada, en Suisse et depuis peu en France. Près de 10 % des hommes seraient victimes de violences conjugales (et je n’en fais pas partie…). Outre le blog de l’association et le rapport de l’Observatoire National de la Délinquance et des Réponses Pénales, je vous invite à consulter les ouvrages de Sophie Torrent (L’Homme battu, un tabou au cœur du tabou) et de la psycho-criminologue Michèle Agrapart-Delmas (Femmes Fatales) où l’on apprend « qu’à la maison d’arrêt de Rennes, qui est exclusivement pour femmes, il y aurait 25% de femmes agresseurs sexuels impliquées dans des actes de pédophilie, d’inceste, mais aussi de viol sur d’autres femmes ou sur des hommes adultes. »

Desproges disait : « Il faut rire de tout. C’est extrêmement important. C’est la seule humaine façon de friser la lucidité sans tomber dedans ».

Mais n’oubliez pas : « le rire n’est jamais gratuit, l’homme donne à pleurer, mais il prête à rire ».

En 2012, l’apocalypse n’a pas eu lieu mais nous avons changé de monde. Nous avons fait un pas supplémentaire vers l’abîme salvateur, la culbute finale. Les banquiers centraux ont opté pour la politique de « l’open bar » en termes de stimulations, d’injections monétaires et d’accès aux liquidités, en espérant revoir le consommateur au bar, buvant  au goulot comme s’il n’y avait pas de demain. Or, se soûler n’a jamais été la solution. Et nos banquiers à la noix l’apprendront à leurs dépens. Nous vivons en ce moment la plus grosse bulle de dette (publique et privée) jamais connue par l’humanité. Son implosion fera de la crise de 2008 une sinécure (« a Sunday picnic », comme disent nos amis anglais). Les stimulations de tous genres ne font que tenir la bulle à bout de bras, à repousser l’échéance fatidique mais ne pourront en aucun cas apporter une solution durable. Ludwig von Mises le disait tellement bien : « There is no means of avoiding the final collapse of a boom brought about by credit expansion. The alternative is only whether the crisis should come sooner as a result of the voluntary abandonment of further credit expansion, or later as a final and total catastrophe of the currency system involved. »

Ca fait des années que je vous tanne avec le désencombrement, la sobriété heureuse, la décroissance volontaire. Durant ces années, je me suis enrichit de ce dont je me suis allégé. J’ai irrité (et le mot est gentil) ma femme avec mes tendances monomaniaques à scruter nos habitudes, à évaluer chaque besoin et à raisonner chaque envie. Les cinq R de « Refuse – Reduce – Reuse – Recycle – Rot » (refuser, réduire, réutiliser, recycler, composter) deviennent soulantes, à la longue. Mais stoïque a été ma femme…

En combattant le superflu, en le réduisant à sa plus simple expression (car, même quand il n’y en a plus, il y en a encore un peu), les traits de la vie deviennent plus discernables. La vie elle-même devient plus éclatante, une fois débarrassée de ce brouillard consumériste qui l’enveloppe. Nombreux sont ceux qui se cachent encore derrière les nouvelles tendances de recyclage et d’écoconception, acquérant  ainsi un « permis à consommer », voire à surconsommer. Le recyclage ne sera jamais la panacée. La sobriété volontaire si.

Contrairement au fameux « Il faut que tout change pour que rien ne change » de l’écrivain Giuseppe Tomasi (prince de Lampedusa), on navigue à vue en chantonnant  « Il faut que rien ne change pour que rien ne change ». C’est beaucoup plus simple, plus rassurant mais infiniment plus déprimant.

Le National Intelligence Council (NIC), la branche analytique et prospective des services de renseignement américains vient de pondre son rapport « Global Trends 2030 », projetant le monde de 2030 en termes de limitation des ressources, de pression démographique (avec son lot de défis environnementaux, climatiques et alimentaires et de tensions sur les ressources en eau et en matières premières) et de facteurs potentiels d’instabilité. Le rapport dessine une planète physiquement limitée, vieillissante et soumise à une urbanisation tous azimuts.  Il met en évidence des similitudes entre le monde d’aujourd’hui et celui des grandes transitions de l’Histoire : la fin de l’empire napoléonien en 1815, les lendemains des grandes guerres (1919 et 1945) et la chute du mur de Berlin en 1989 (J’aurais bien volontiers rajouté la chute de l’empire romain d’Occident en 476). A chaque fois, le monde a été à la croisée des chemins. A chaque fois, l’option retenue a façonné le monde sur des décennies.  De ce rapport, j’ai retenu deux points pour vous :

  1. l’urbanisation croissante « a conduit à des réductions drastiques des forêts, des changements négatifs dans le contenu nutritif et la composition microbienne des sols, des altérations dans la diversité des plantes et animaux supérieurs (incluant des extinctions locales) ainsi que des changements dans la disponibilité et la qualité de l’eau douce. »
  2. Les rendements agricoles s’améliorent certes mais à un rythme qui ne compense guère l’augmentation des besoins alimentaires de la population mondiale. « Au cours de sept des huit dernières années, le monde a consommé plus de nourriture qu’il n’en a produit. Une grande étude internationale estime qu’en 2030, les besoins annuels en eau atteindront 6 900 milliards de mètres cubes, soit 40 % de plus que les ressources durables actuelles. »

Bon… je pense que vous avez reçu le message 5/5. Tout va bien dans le meilleur des mondes.

Entre temps, nos p’tits lutins (voir mon billet de l’année dernière :http://tingitingi.canalblog.com/archives/2012/01/03/23145266.html ) ont survécu tant bien que mal à la crise. Les lutins banquiers ont fait passer leurs soucis de solvabilité pour de simples problèmes de liquidité. Ils ont eu alors accès à l’open bar du lutin super-banquier, qui s’est contenté de faire tourner la planche à billets à donf, le tout avec la bénédiction des lutins tchatcheurs-politicards. Et vu qu’ils maitrisent l’art du larmoiement, ils se sont aussi faits renflouer par les mêmes lutins tchatcheurs-politicards. Des milliers de milliards (oui oui des billions… mais « milliers de milliards », ça en jette plus !) de kilos de champignons y sont passés. Les lutins banquiers ont repris sereinement leur business lucratif d’avant, en évitant scrupuleusement tout ce qui fait partie de l’économie « réelle » (peu sexy et très risquée). Quant aux lutins tchatcheurs-politicards, ils se sont finalement retrouvés dans la mouise (qui ne fait que se déplacer):

  • Avec un endettement hallucinant dépassant de loin la production nationale de champignons. Cette dernière étant en chute libre compte tenu de la défection des lutins consommateurs à gogo, dont une bonne partie a été mise au chômage technique et l’autre partie ne rêve que de se faire oublier.
  • Avec un déficit de fonctionnement qui montre à l’évidence qu’ils pètent plus haut que leurs culs.
  • Avec une méfiance de plus en plus palpable de la part des lutins trimeurs (surtout ceux aux yeux bridés, qui épargnent et qui prêtent) qui doutent de leur capacité à rembourser. Les 2 partis se tiennent par la barbichette, mais l’un des deux finira par craquer.

Conscients du fait qu’ils ont tiré leurs dernières cartouches, nos lutins tchatcheurs-politicards  sont actuellement en train de se faire tout petits, tout discrets (en attendant que la tempête passe et qu’on les oublie), de réduire la voilure sur tout ce qui est accessoire et superflu (éducation, santé, retraites, aides sociales…) et d’augmenter les ponctions sur les lutins-trimeurs qui font partie de leur circonscription. Un double effet kiss-cool qui fait descendre les lutins-trimeurs dans la rue… Les lutins-indignés sont nés. Dans peu de temps, les lutins casseurs-révolutionnaires et les lutins flics-mateurs entreront dans la danse.

L’ensemble du système sera alors au pied du mur. Ce système a été dessiné pour un monde en perpétuelle croissance.  Ce n’est donc pas étonnant qu’il soit devenu en perpétuelle surcapacité. Seule la reprise de la consommation à gogo et à crédit (ou une surprenante rupture technologique) lui donnera une porte de sortie honorable. En l’absence d’une telle reprise, il ne pourra que végéter ou imploser. Une histoire à suivre de près, car on est tous des lutins dans le pétrin. Et si le Titanic coule, même les passagers de première classe y resteront (image poétique que je dois au ministre des affaires étrangères espagnol).

On a juste vécu une p’tite crise du Système. On a ensuite subi une p’tite réplique insignifiante. Et on vivra sous peu l’ivresse de la troisième phase, telle que décrite par Baudelaire dans « Du vin et du hachisch » : « La troisième phase, séparée de la seconde par un redoublement de crise, une ivresse vertigineuse suivie d’un nouveau malaise, est quelque chose d’indescriptible. C’est ce que les Orientaux appellent le kief; c’est le bonheur absolu. » Le kief est pour bientôt…

A la même époque de l’année dernière, je vous suggérais de mettre vos ceintures de sécurité car ça allait secouer.  Les secousses ont failli laisser deux-trois pays sur le bitume. Cette année, le masque et les palmes s’imposent. Gonflez bien vos poumons, car c’est parti pour cinq années d’apnée, d’ivresse…

Et puis, n’oubliez pas : La révolution est en marche. Notre p’tite carte est là pour vous en apporter la preuve…

Sachant que « sur cent personnes à qui l’on souhaite bonne année, bonne santé le premier janvier, deux meurent d’atroces souffrances avant le pont de la Pentecôte » (Desproges),j’ai décidé de ravaler mes vœux.

Bises à toutes et à tous.

Zouheir

 

PS I : Pour suivre nos conneries sur Twitter : https://twitter.com/#!/Tingitingi

Quant aux insultes éventuelles, continuez à les envoyer sur notre adresse réservée :nicolas@sarkozy.fr

PS II : En cadeau de Noël, je vous ai déniché une p’tite adaptation (de Jérôme Leroy, visible sur le site bakchich.info) des ‘Tontons flingueurs’ à la crise des subprimes et au plan Paulson.

La grande classe internationale… Ames sensibles s’abstenir.

 

F-    Alors qu’est-ce qui vous amène encore, les Volfoni ?

V-   Fernand, t’as plus d’esgourdes ou quoi, t’entends plus rien, t’es aussi sourdingue que le Mexicain sur son déclin. C’est la crise financière, Fernand, la catastrophe pour l’actionnaire, l’Armageddon de la thune, l’apocalypse du crédit. Y vont nous l’enfiler jusqu’au trognon, Fernand, les amerloques. Ca va être le plan Marshall à l’envers, mon petit camarade, l’Europe ruinée, le populo sur les routes, le retour à la barbarie. On est à la limite du nervous brèquedonne géopolitique, Fernand. Ca va se finir avec des émeutes devant les épicemards, à se peigner comme des sauvages autour d’un paquet de spaghettis. J’te dis qu’ça, mon Fernand, on va être éparpillé façon puzzle, nous et nos PME d’honnêtes artisans, élevés dans le souci du travail bien fait et de la prestation de qualité chez l’arpenteuse de trottoir.

F-    Arrêtez les Volfoni, vous z’allez finir par me foutre le traczir. On n’a rien à craindre, nous, on est l’économie réelle. Personne va nous les prendre, nos kilomètres de bitume avec nos gagneuses. Même que j’aurais tendance à penser que vu le climat est pas franchement à la sérénité, le goldène boïlle, y va venir plus souvent qu’à son tour se faire shampouiner le chauve, histoire d’oublier ses tracas monétaires.

V-   Et avec quoi, il va la payer la gonzesse. Des tickets de PMU ? Il a plus rien, le goldènen boïlle, qu’est-ce que tu crois, Fernand ? Ses portefeuilles ont été atomisés, ses actions sont hachées menues et ses sicav glissent sur la pente fatale, il est raide comme un passe-lacet, il a autant de pouvoir d’achat qu’un clandestin anorexique, ton traideure. Même une gâterie moldave genre « pimpon vl’a pompier qui passe », il aura pu les moyens, ton cave.

F-    Et ce Paulson, là, son plan pour arrêter le carnage, ça a l’air sérieux. Un secrétaire au Trésor, c’est quand même pas le premier branque venu. C’est pas des comiques, les protestants en général, non ? Le luthérien, c’est pas son genre à échafauder du baroque, à sombrer dans le somptuaire, à jeter le pognon par les lucarnes. Ca a le souci du grisbi, ces hommes-là, quand même, les gouverneurs de banque centrale et tout le toutim, ils ont les arpions sur le plancher des vaches, quoi, enfin…

V-   Parce que les subprimes, ça te semble une idée rationnelle, Fernand ? Tu stratosphérises de la chéchia ou quoi ? Un coup de chaleur de parpaillots illuminés, voilà c’qui s’est passé et voilà pourquoi on est dans une telle mouscaille. Tu fais confiance à un pays qui pourrait avoir comme vice-présidente une grande bringue à lunettes avec un fusil, une Jeanne d’Arc des Icebergs qui te fait des chiées de mômes en se faisant ramoner le frifri sur des dépouilles encore fumantes d’un ours blanc dégommé à l’obusier de campagne. Je vais te dire ce que c’est, moi, le plan Paulson, c’est un piège à caves, un truc de bandits de grand chemin, de Robin des bois qu’aurait pris trop de schnouffe et qui piquerait le pognon des pauvres pour le donner aux riches qui risqueraient de devenir pauvres. Même le Bernard Tapie, qu’est pourtant pas un enfant de Marie, il aurait pas osé dans ces proportions-là. Et son coup du Lyonnais, là, ses dommages et intérêts, permets nous de t’affranchir : c’est du grand art, on irait même jusqu’à apprécier l’esthétique de la chose, le sublime dans l’empapaoutage du citoyen. Mais t’auras beau dire, le Nanard, ça reste un amateur, un joueur de deuxième division si tu compares avec le Paulson et son plan pour glandus. Paulson, c’est du grand art, de la haute couture pour rhabiller les banquiers qui se sont retrouvés à loilpé à force de jouer avec le crédit des pue-la-sueur qu’avait même pas le moyens de se payer un petit home où qui zauraient bu du ouisquie en regardant les télé-évangélistes.

F-    Qu’est-ce qu’on va faire, alors, les mecs, parce que moi le discours de Toulon du cavillon à Rollex, il m’a comme qui dirait moyennement rassuré. Un jour, il taille des plumes au Capital et l’autre, il se prend pour Lénine en pleine NEP. Et pis en face, l’illuminée du Poitou, j’la sens pas franchement. J’ai jamais eu la mentalité scoute, pour tout vous dire.

V-     C’qu’on va faire, Fernand, c’est comme d’habitude. On va planquer de la joncaille en loucedé et puis on va boire un canon. Entre hommes..